vendredi 28 décembre 2012

Nos séries télé 1970-1980

Passionnés, les auteurs sont animateurs du site www.-toutelatele.com. Ce livre est consacré aux séries télévisuelles. Le genre évolua des sages années 1960 aux flashs des années 1970- 1980.

Sans coup férir, on descendit du cheval de Zorro pour enfiler le costume serré de l’agent James West et se castagner contre le nain Loveless. On échangeait la cape noire et la ruse contre un train d’inventions du gouvernement américain. Une agence de furieux hors de contrôle prenait tous les risques dans une croisade antiméchants. Chapeau bas à la sexy Emma Peel, qui talonnait les bandits à coups de bottes de cuir. Au soleil d’Hawaï, la moustache de Magnum en chemise à fleurs, au volant d’une Ferrari, ça éclabousse! Le ranch de Dallas n’était pas kitsch, l’infâme JR n’était pas mort. Que du rêve!

Cet album étourdissant est illustré par une incroyable collection de photographies de magazines, pochettes de disques, objets de référence et produits dérivés d’ordre divers.

Nos séries télé 1970-1980 de Jérôme Roulet et Alexandre Raveleau HORS COLLECTION 212 pages, 25,30 euros

mercredi 26 décembre 2012

Moi, René Tardi, prisonnier de guerre au stalag II B

Après la défaite de 1940, le militaire de carrière René Tardi sera interné en Poméranie durant cinq ans. Il avait fini par l’écrire sa guerre. À soixante-six ans, le fils retrace l’histoire paternelle en bande dessinée. Un récit en trois couleurs. Le quotidien de milliers d’hommes gardés comme des pièces de viande par des fonctionnaires déshumanisés. Des humains parqués, qui souffrent, rigolent, s’emmerdent en essayant de survivre tous les jours.

Moi, René Tardi, prisonnier de guerre au stalag II B de Tardi aux éditions Casterman, 160 pages, 25 euros.

vendredi 21 décembre 2012

Un vrai crime pour livre d'enfant

Australienne grandie à Melbourne, Chloé Hopper émigra aux États-Unis pour étudier. Aujourd’hui âgée de trente-cinq ans, elle vit de ses écrits. Son premier roman, semi-autobiographique, est un roman noir inspiré de sa première expérience d’enseignante.

L’histoire est celle d’une jeune et fraîche émoulue institutrice, Kate, dont l’attention est attirée par le caractère et la grande sagacité de l’un de ses élèves. Kate rencontre ses parents, il s’agit de Thomas et Veronika. Cette dernière vient de publier un livre sur un terrible fait divers: une femme trompée aurait assassiné la maîtresse de son mari avant de se jeter d’une falaise. Peu impressionnée, l’impétueuse Kate entame une relation adultère avec Thomas, le mari de la romancière. Tout semble rester calme sous un ciel serein, quand d’étranges signes viennent perturber le paisible équilibre de cette jeune fille adultère.

Partant d’une histoire de crime classique, basée sur la tromperie et la vengeance, l’auteur introduit un roman historique, auquel se joint un conte cruel pour enfants. Tous les éléments s’emboîtent, s’imbriquent, au point de piéger le lecteur. La réflexion sur la mécanique de l’écriture peut gêner, mais ce n’est qu’une perversion stylistique qui s’ajoute au plaisir. Ce roman est une fable cruelle sur la perte de l’innocence, qui est aussi la venue à l’écriture d’une jeune femme. L’habile lecteur peut aussi bien en conclure qu’être institutrice cela n’était pas vraiment son truc, à cette nouvelle écrivain.

Un vrai crime pour livre d'enfant de Chloé Hopper, aux éditions Christian Bourgois, 304 pages, 22 euros.

jeudi 20 décembre 2012

Dans la brume électrique avec les mort confédérés

Natif du Texas, James Lee Burke a multiplié les emplois alimentaires et parcouru les États-Unis jusqu’à ses cinquante ans avant de pouvoir s’installer comme écrivain. Dave Robicheaux est un shérif du comté de New Iberia, proche de la Nouvelle Orléans. Ce vétéran de la guerre du Vietnam est un homme à l’existence tranquille, qui aime sa vie de famille dans sa maison au bord de l’eau. S’il se sent usé par les laideurs de la vie, ses descentes en ville sont souvent bien arrosées et, comme on vient le chercher, il se lâche en brisant les voyous qui le prennent pour un vieux tableau. Ce qui complique ses rapports avec les politiques, sa hiérarchie et la moitié de la ville, ce dont il se fout éperdument.

Cette fois, c’est un acteur de cinéma, interpellé par Robicheaux pour conduite en état d’ivresse, qui lance une affaire en affirmant voir les morts d’une bataille de la guerre de Sécession sur les lieux du tournage de son nouveau film. Sur ses indications des recherches vont être menées, jusqu’à la découverte d’un squelette dans les marais proches de la ville. Ces images vont alors raviver la mémoire de Dave Robicheaux, qui va se pencher sur le souvenir d’un autre crime.

Bertrand Tavernier vient d’adapter pour le cinéma ce roman de James Lee Burke, le Faulkner du roman noir. Un ténébreux auteur au style collé à la moiteur de la Louisiane et à l’emportement des cyclones.

Dans la brume électrique avec les mort confédérés de James Lee Burke aux éditions Rivages/Noir, 479 pages, 10,40 euros.

mercredi 19 décembre 2012

Emmuré vivant

Le pseudonyme de Natalia Alexandrova cache un couple d’écrivains russes, auteurs d’une soixantaine de romans occupant régulièrement les listes des meilleures ventes en Russie.

Ce roman ressemble davantage à un roman de la poisse qu’à un roman noir d’aventure, de l’angoisse. À Saint-Pétersbourg, de nos jours, une jeune femme très sage est certaine de faire tout ce qu’il faut pour garder le prince charmant. Elle a démissionné de son travail et prépare son mariage. Tout est à sa place. Mais après une soirée barbecue passée chez de fervents adeptes du socialisme ouvert à toute entreprise libérale, le futur mari est victime d’un accident de la route. Le malheur s’abat sur la candide Russe. Son fiancé momifié est dans le coma à l’hôpital. Très vite elle se retrouve virée de l’appartement de son futur mari. À la rue et sans emploi, elle doit retourner se faire héberger par son frère et sa mégère. La momie, réveillée, communique en morse à la fiancée à son chevet qu’elle se sent menacée. Dans la nouvelle Russie conquise par le dollar, la jeune femme déboussolée est la première suspecte de la police, qui ne se fatigue plus à chercher les raisons de commettre des attentats contre des personnes privées. Des hommes d’affaires s’inquiètent aussi de la survie de ce fiancé, lui dont la vie semblait aussi romanesque qu’un chant militaire.

L’ère du collectivisme est bel et bien révolue, désormais chacun veut abuser de tous les autres.

Emmuré vivant de Natalia Alexandrova, aux éditions fleuve noir, 282 pages, 19 euros.

mardi 18 décembre 2012

L’affaire de l’esclave Furcy

Le 16 mars 2005 tous les documents concernant «l’affaire de l’esclave Furcy» furent mis aux enchères à l’Hôtel Drouot. Trente ans avant la loi d’abolition de 1848, ces papiers relataient le plus long procès qui fut intenté par un esclave à son maître. Cette centaine de lettres manuscrites, de comptes rendus d’audience et de plaidoiries illustrent une période de l’histoire de France.

Ces archives dévoilent le récit extraordinaire du combat d’un esclave de trente et un ans prénommé Furcy. Un jour d’octobre 1817, dans l’île Bourbon (actuellement la Réunion), il décida de se rendre au tribunal d’instance de Saint-Denis pour exiger sa liberté. Dans ce combat, Furcy bénéficiera du soutien d’un magistrat: Gilbert Boucher, procureur général de l’île en 1817. Et aujourd’hui, malgré un dossier très volumineux et toutes ces années de procédure, le public ne sait plus rien de l’affaire qui mena Furcy devant les tribunaux. Pourtant ce procès fut unique en son temps. Il connut de très nombreux rebondissements, dura près de vingt-sept ans avant de connaître son dénouement le samedi 23 décembre 1843 à Paris.

Né en 1964 en Algérie, Mohammed Aïssaoui a fait ses études en sciences politiques et est devenu journaliste spécialisé en littérature. En prenant le temps de retrouver Furcy, il a voulu faire sortir de l’ombre et de l’oubli des hommes qui ont mené leur combat pour faire avancer la société.

L’affaire de l’esclave Furcy de Mohammed Aïssaoui, aux éditions Gallimard, 195 pages, 16,90 euros.

lundi 17 décembre 2012

À nous deux, Paris!

du Japon, un jeune assistant dessinateur de BD débarque de son île natale à Roissy. Il vient pour travailler. Ce problème posé est résolu dès son arrivée à Paris car son emploi n’existe pas. Pas découragé, le jeune homme s’active jusqu’à décrocher un boulot dans une supérette spécialisée en produits asiatiques de la rue Sainte-Anne.

Jusque-là cantonné dans son île, berceau d’une civilisation séculaire, ses pérégrinations vont amener ce jeune homme à approfondir sa réflexion sur l’Occident moderne. Comment Paris, ses habitants, ses us et coutumes sont-ils perçus par un Japonais? Arrivé pétri d’admiration envers la capitale du chic et de la mode, il va de surprise en étonnement.

L’humour avec lequel ce dessinateur déchiffre notre quotidien est une réelle découverte. Le dessin semble naïf, mais c’est pour mieux nous captiver. Cette bande dessinée est totalement adaptée en français, pour en faciliter la lecture.

À nous deux, Paris! de Jean-Paul Nishi aux éditions Philippe Picquier, 192 pages, 14,90 euros

dimanche 16 décembre 2012

Moisson rouge

Dashiell Hammet (1894-1961) fut un des fondateurs du roman noir américain. Créateur de l’archétype du détective dur à cuir, un homme qui revient de loin pour conclure, quoi qu’il lui en coûte. Dans sa jeunesse Hammet fut détective privé dans l’agence Pinkerton. Un employeur célèbre pour ses services rendus à un patronat américain complice de la mafia, qui fait la chasse aux communistes, syndicalistes libéraux, noirs, homosexuels et aux Mexicains. Cette liste est non exhaustive. Mais tout cela se passait avant l’invention du FBI. La carrière littéraire de Dashiell Hammett sera abrégée par le harcèlement dont il fera l’objet dès le milieu des années trente. Il ne cachera jamais ses opinions de gauche. Ses ouvrages seront interdits de diffusion, il disparaîtra des bibliothèques publiques pour ne plus y revenir. Taxé de communisme, il sera envoyé six mois en prison en 1951. Son cancer du poumon le tuera dix ans plus tard.

En 1929 Dashiell Hammett avait publié Moisson rouge, une révolution littéraire qualifiée de «série noire» par les intellectuels en 1944. Quatre-vingts ans plus tard, les éditions Gallimard présentent une nouvelle traduction, débarrassée des tournures impropres qui ternissaient la première édition française. De son écriture sèche, Dashiell Hammett dépeint une société corrompue par l’entre-deux-guerres. C’est l’histoire d’un maire d’une cité minière du Montana qui, après avoir utilisé la pègre pour réprimer des grèves, engage un détective privé sans scrupules afin de nettoyer le bourbier. Personne ne sera déçu.

Moisson rouge de Dashiell Hammett série noire Gallimard 283 pages, 18,50 euros.

samedi 15 décembre 2012

Cat Chaser

Ce passionnant ouvrage, qui voyage dans le temps et l’Histoire, est l’occasion d’explorer les croyances des sociétés qui se sont succédé. Mais aussi de s’interroger sur le devenir collectif de notre monde et notamment sur ce qui mériterait d’être sauvé face à ce que l’on souhaiterait voir disparaître à tout jamais.

Elmore Leonard, auteur «pulp» il y a soixante ans, s’est converti au cinéma, à la télévision et au roman policier. Le roman à l’origine du film mythique Jackie Brown est de lui, comme le western 3h10 train pour Yuma. En 2007, Leonard a publié ses dix règles d’écriture, la formule étant: quand cela ressemble a de l’écrit, je réécris. Le présent ouvrage fut adapté au cinéma par Abel Ferrara en 1989.

Dans le feuilleton de la République dominicaine, l’ami des Américains et dictateur, Trujillo, a quitté l’exercice du pouvoir dans un accident de voiture en 1961. Ses complices s’enfuiront en Floride. Après une épuration, une république s’installe. Elle est renversée en 1965. Le président Johnson et le Sénat font débarquer 20 000 hommes sur l’île. Le jeune engagé George Moran participera au combat de l’Amérique démocratique contre la révolution gauchiste comme tireur d’élite au bataillon des «Cat Chaser». Terme désignant les chasseurs embusqués tirant des toits, mais aussi les dragueurs en argot. Rentré au pays, George vieilli avec bonheur. Nostalgique, il revient à Saint-Domingue quinze ans plus tard. En touriste, il cherche la fille qui se fichait de lui en faisant le coup de feu. Il en retrouve une autre, celle qui lui avait tourné la tête, une bombe glacée américaine, mariée avec un bourreau du dictateur Trujillo. La chasse reprend.

Cat Chaser d’Elmore Leonard aux éditions Rivages/Noir 254 pages, 8,65 euros.

vendredi 14 décembre 2012

Alix Senator

La scénariste Valérie Mangin et le dessinateur Thierry Démarez ont repris les aventures d’Alix. Un jeune Romain missionné auprès du neveu de Jules César, qui fut inventé par le regretté Jacques Martin en 1948. L’astuce est bien agréable.

Tout comme ses lecteurs, Alix Graccus a vieilli, il a passé les cinquante ans et acquis les honneurs du Sénat. De son côté son ami Octave a réussi dans la vie, il est devenu le premier empereur de Rome. En 12 avant notre ère, la paix semble régner dans l’empire d’Octave Auguste, tout-puissant. Dans ce ciel devenu limpide, un aigle armé de griffes d’or va surgir et massacrer le gendre de l’empereur. L’oiseau est le symbole de Jupiter, souverain des dieux. Auguste demande à Alix d’enquêter sur ce qui pourrait être un attentat, ou une malédiction divine. À cheval, on découvre Titus, son blondinet de fils, une copie affadie du père, accompagné d’un ami, Khephren, fils d’Enak. Faisant le mur pour se rendre au lupanar, les jeunes gens vont tomber dans un nid d’intrigues, dont les chemins mènent aux lieux les plus sacrés de Rome. Les augures annoncent la mort d’Auguste qui refuse de nommer un flamen dialis. L’attentat échoue, mais la menace persiste. La suite au prochain tome.

Alix Senator de Martin, Mangin et Démarez aux éditions Casterman 47 pages, 12,95 euros.

jeudi 13 décembre 2012

Les sentiers du désastre

La fin est arrivée à Mexico pour Donald Westlake. Il avait 75 ans mais il ne les faisait pas. Auteur prolifique, il s’était essayé au roman érotique, à la science-fiction, au western, à la biographie, à la politique-fiction. Il ignorait donc le nombre de livres qu’il avait écrits, avouait au moins dix pseudonymes, avant de conseiller aux journalistes qui l’interrogeaient d’aller chercher sur internet. Il avait trouvé sa voie dans le roman policier noir et doré à l’humour fin.

Westlake a créé le voleur lamentable, Dortmunder, un raté qui ne vole que les voleurs d’une société organisée autour du crime. Son autre personnage fétiche, Parker, est un tueur froid, soucieux des progrès du genre humain. Tranquille, il s’assumait bien en auteur politiquement incorrect, voire incivil. En France, son livre le plus connu, Le couperet, un roman social où l’on voit un cadre sans emploi se transformer en machine à tuer, a été adapté au cinéma par Costa-Gavras avec José Garcia dans le rôle du serial chômeur.

Les sentiers du désastre est son dernier roman paru en France. Devenu un renégat, John Dortmunder travaille comme majordome chez un malhonnête magnat de la finance qu’il veut dévaliser. Mais l’homme d’affaires disparaît. Le premier soupçonné dans ce genre d’histoire, c’est toujours le majordome.

Les sentiers du désastre de Donald Westlake, aux éditions Rivage noir n°709, 400 pages, 9,50 euros.

22 Britannia road

Native du Somerset en Angleterre, devenue journaliste à La Dépêche du Midi où elle signe sa chronique anglaise, Amanda Hodgkinson réside dans le sud de la France. Ce livre est son premier roman. Une histoire qui commence au printemps 1946. Silvana s’embarque avec son petit garçon, Aurek, pour l’Angleterre. À cette adresse du 22 Britannia road, ils vont retrouver Janusz, le mari de Silvana. Les deux époux ne se sont pas revus depuis le début de la guerre. Lorsque Janusz a quitté Varsovie pour rejoindre son régiment, les deux jeunes gens s’étaient mariés depuis peu. Leur bébé n’avait que quelques mois. Pour Silvana, la guerre sera synonyme d’exil, comme pour beaucoup de civils polonais obligés de fuir Varsovie devant l’arrivée des Allemands. Elle et son enfant quitteront la Pologne, subsisteront à grand peine dans les forêts de l’Europe de l’Est.

De son côté, Janusz, rescapé des combats, a fui en France où il a trouvé refuge dans une ferme. Il a vécu d’autres histoires, rencontré d’autres femmes. La décision de rechercher sa femme et son fils ne viendra pas de lui, mais d’une femme qui le quitte. Mais ces époux qui veulent renouer leurs liens défaits se cachent l’essentiel: le choix, les décisions prises seul pendant leurs sept ans de malheur. Lorsqu’en dépit d’eux-mêmes les vérités douloureuses verront le jour, la rupture semblera définitive.


22 Britannia road de Amanda Hodgkinson aux éditions Belfond, 429 pages, 21 euros.

lundi 26 novembre 2012

John Lennon, une vie

Trente ans après sa mort, un véritable culte s’est développé. John Lennon qui proclamait que les Beatles étaient plus célèbres que Jésus-Christ. La marque de John Lennon sur le vingtième siècle est-elle indélébile?

Pour répondre à l’éternelle question de savoir qui est l’homme derrière la star assassinée, Philip Norman a remonté le temps. John Winston Lennon est né en plein Blitz pendant un raid de l’aviation allemande en 1940. Sur la base de témoignages inédits et de sources jusque-là ignorées, l’écrivain revoit ce gamin anonyme, écorché vif, mal embouché, qui deviendra le «working class hero» et le milliardaire le plus décomplexé de son temps.

De la fin des années cinquante à la fin des années soixante-dix, Philip Norman restitue l’esprit et l’énergie des quatre garçons dans le vent. L’histoire d’un mec qui était rarement de bonne humeur et jamais de bonne composition. Bien qu’elle ait participé à l’élaboration de ce livre, Yoko Ono n’en cautionne pas les propos. Tant mieux. De cette biographie sont exclus des écrits bénis et sanctifiés par la veuve de Lennon, cela évite la lecture affligeante d’une hagiographie lénifiante. L’auteur, bien qu’il y soit attaché, n’épargne pas les faces cachées de son sujet. De son vivant, l'homme se dévoila beaucoup devant les caméras et les photographes.

John Lennon, une vie de Philip Norman aux éditions Robert Laffont, 858 pages, 24,90 euros

dimanche 25 novembre 2012

Malheur aux Barbus - Signé Furax

Sous le slogan «Les temps sont durs! Vive le MOU!», l’humoriste Pierre Dac (1893-1975) fut le candidat du Mouvement Ondulatoire Unifié à l’élection présidentielle de 1966. Décoré de la croix de guerre, Légion d’honneur, médaillé de la Résistance, il renoncera à se présenter à la demande de l’Élysée pour ne pas se brouiller avec de Gaulle. En 1972, il inaugurera sa statue à Meulan en urinant dessus avec son complice Francis Blanche (1924-1974). Ensemble, ils avaient commis d'autres chefs-d’œuvre, dont Signé Furax.

Les éditions des Presses de la Cité ont eu la géniale idée de publier le texte intégral des 213 épisodes de la première saison d’une série mythique, diffusée du 15 octobre 1951 au 28 juin 1952, à 13h10 sur la chaîne parisienne de la RTF. Repris sur les ondes d’Europe 1, du 22 octobre 1956 au 29 juin 1960, Signé Furax a connu deux rediffusions. Un temps que les moins de soixante ans ignorent, la France entière se pliait de rire à l’écoute d’un pur délire. Les bandes magnétiques de Malheur aux barbus ont disparu. Ces scripts nous font redécouvrir un roman populaire d’aventure fantaisiste, relevé de calembours grivois, au suspense poétique.

Ce sont les aventures de deux détectives, Black et White, en lutte contre le maléfique Edmond Furax. Ce diabolique génie du crime revendique la disparition par dizaines des barbus de Paris. Mais dans quel but?

Malheur aux Barbus - Signé Furax de Pierre Dac et Francis Blanche aux éditions Presses de la Cité, collection omnibus 1.310 pages, 28 euros.

samedi 24 novembre 2012

Un homme de tempérament

À la lecture de cette biographie, le précurseur de la modernité scientifique, l’inventeur de la guerre des mondes apparaît comme un écrivain fécond, charmeur, amateur de flirts. Herbert George Wells (1866-1946) est le fils d’un jardinier, devenu boutiquier, et d’une ancienne domestique. Élevé dans la petite bourgeoisie, il comprendra son temps, gagnera fort bien sa vie dans le journalisme littéraire. D’une créativité foisonnante, ses ouvrages de science-fiction lui apporteront la gloire dès 1895.

À la fin des années trente, il critiquera l’Union soviétique et Staline, ce qui le fâchera avec la gauche, qui le portait aux nues comme un écrivain social.

Prolifique, il le fut aussi dans ses relations amoureuses. De son propre aveu, H. G. Wells était incapable, du fait de sa nature, de refuser les avances d’une femme.

L’écrivain David Lodge dépeint un homme aux goûts de géant, qui domina la littérature anglaise de la fin du XIXe siècle jusqu’à 1929.

Un homme de tempérament de David Lodge aux éditions Rivages, 720 pages, 24,50 euros.

vendredi 23 novembre 2012

Dolce vita 1959-1979

Depuis trente ans, Simonetta Greggio écrit en français. Redevable envers sa patrie, elle publie sa chronique de l’avant et de l’après des années de plomb. Une bonne histoire italienne sans une confession, cela n’existe pas. Un mystérieux prince Malo raconte à son prêtre ces années noires où se sont alliés l’État, le Vatican, la mafia et la franc-maçonnerie.

Emprunté au film de Federico Fellini, sa sortie en Italie commence l’histoire, le titre du roman célèbre la culture d’une nation. L’auteur y raconte cette organisation de la disparition des hommes politiques, du pouvoir démocratique au profit des groupes de pression. Les assassinats, les enlèvements, les attentats vont noyer l’opinion dans la seule vague des Brigades rouges. Le pouvoir de résistance à la loi deviendra très fort. À l’image du pays où le viol était jugé comme une atteinte à la morale et non comme un crime envers une personne. Les héros sont morts pendant les années de plomb.

Dolce vita 1959-1979 de Simonetta Greggio aux éditions Livre de Poche, 360 pages, 7,10 euros.

jeudi 22 novembre 2012

Marcinelle 1956

En Belgique, le 8 août 1956, dans les mines de charbon de Bois du Cazier, à Marcinelle, c’est le drame. Au changement d’équipe, un incident technique est provoqué par une mauvaise communication entre l’employé du fond de la mine et celui de la surface. Un chariot sortant du monte-charge va basculer dans le conduit de remontée en tranchant sur son passage les fils d’alimentation électrique, la conduite d’huile sous pression et le tube d’air comprimé. Un court-circuit déclenche le feu: 262 hommes meurent. L’émotion en Belgique et en Italie sera intense. L’entreprise du Bois du Cazier est stoppée dans sa course à la productivité. L’immigration italienne vers les bassins miniers belges est interrompue. Au procès l’acquittement est général pour les patrons. Lors de la procédure d’appel, seul le directeur des travaux sera condamné.

Quatre ans après la catastrophe de Marcinelle, Sergio Salma naît en Belgique dans les corons. Ces petites cités ouvrières faites de maisons modestes d’un tenant, séparées par des haies, des clôtures ou des potagers. Cet hommage prend forme autour d’une fiction. L’auteur a dessiné un roman graphique épuré à partir de témoignages et d’archives de l’époque. Cet après-guerre où le travail est une valeur absolue, la garantie d’une vie meilleure au sein de la communauté des travailleurs. Paradoxalement, les aspirations au bonheur individuel d’un jeune émigré vont lui sauver la vie.

Marcinelle 1956 de Sergio Salma aux éditions Casterman 254 pages, 17 euros.

mercredi 21 novembre 2012

Manchester Music City 1976-1996

Manchester Music City 1976-1996Vers la fin des années soixante-dix, John Robb s’établissait à Manchester. Avec bien d’autres, il avait choisi de résider dans un endroit où les chauffeurs de taxi honnêtes refusent de se rendre.

À la fin des années soixante, Manchester devient un désert. L’activité des hommes disparaît avec la fin de l’industrie. Oubliée de l’Administration, la ville abandonnée possède des milliers d’appartements vides. La nature va combler ce néant. Des gens vont s’y installer après avoir changé les serrures. En ce temps-là, les habitants de ces faubourgs pas du tout huppés estimaient que les huissiers expulsaient les locataires illicites au bout de vingt ans. D’où la ribambelle d’étudiants, d’artistes, de chômeurs, de drogués qui résidaient dans le plus grand squat d’Angleterre. En 1981, John Robb a vingt ans. Il a survécu au mouvement punk, tant sur la scène musicale que dans la presse underground. Chanteur du groupe les Menbranes, puis de Goldblade, il devient post-punk militant dans les émissions de télévision.

Les intervenants forment le récit. Ils se sont fréquentés, liés, fâchés, réconciliés pendant une vingtaine d’années. Que ce soit au sein de leurs groupes, dans la boîte de nuit l’Hacienda, ils ont contribué ensemble à l’élaboration du son musical de Manchester.

Dans un langage vif et très imagé, ce livre est un répertoire de la créativité artistique de ces années-là.

Manchester Music City 1976-1996 de John Robb aux éditions Rivages Rouge 615 pages, 11 euros.

lundi 19 novembre 2012

Feel like going home - legends du blues & pionniers du rock’n’roll

L’écrivain américain Peter Guralnick est né à Boston, célèbre pour son excellence culturelle. Depuis la disparition des pôles économiques liés au textile et aux ports, l’activité intellectuelle des universités, bibliothèques et les festivals, font vivre la région. Les sièges de la haute finance résident dans cette ville. L’auteur avoue qu’il a commencé à écrire sur la musique dès qu’il en a écouté. Les Bostoniens sont ainsi, ils se cultivent pour lire ensuite.

Publié en 1971 aux États-Unis, ce livre était inédit en France. Quarante ans après, cette lacune est comblée. L’ouvrage se compose de portraits en série rédigés en suivant une progression historique. Chaque musicien figurant dans cet ouvrage est un artiste majeur aux yeux de l’auteur. Il veut les montrer comme il a pu les rencontrer. En immersion dans leur mode d’expression lors d’entretiens privés, comme devant leur public. Toute la musique noire américaine tire ses racines de la campagne traditionnelle, avant d’évoluer en blues au contact des villes. Évidemment, la réalité de ces musiciens est étrangère à celle d’un universitaire blanc qui veut écrire sur eux. Un vrai bonheur de lire, entre les lignes, cet auteur qui a du mal à savoir dans quel état il va pouvoir repartir. Le rock’n’roll a tué le blues et il nous a délivrés du passé. Elvis l’a si bien chanté, avant de le ressusciter.

Feel like going home - legends du blues & pionniers du rock’n’roll de Peter Guralnick aux éditions Rivages Rouge 387 pages, 10 euros.

dimanche 18 novembre 2012

Au bord de l’eau

L’histoire relate les activités de bandits actifs dans les préfectures de Chuzhou et Haizhou sous le règne de l’empereur Huizong. Des textes officiels mentionnent les faits d’armes de Son Jiang et de ses 36 capitaines. Autour de la vie de ces marginaux la légende se bâtit, les transformant en héros du peuple. Son Jiang devient le héros des 108 du Mont Liang. Un chef qui impose le respect, bien qu’il ne soit ni un merveilleux combattant, ni un immense intellectuel.

Le roman fut rédigé après des siècles de transmission orale. La version de Shi Nai-an remonte au XIVe siècle. L'histoire s’est propagée dans toute l’Asie. Par le nombre de ses lecteurs ce récit est davantage lu que la Bible. Comme dans les romans populaires chinois, la présentation des personnages se fait en page de garde. Au bord de l’eau, c’est une place forte avec des personnages, dont «les 108». Ces derniers constituent une société secrète dissidente. Toutes les couches de la société y sont représentées, du forgeron au moine en passant par le lettré. En lutte contre l’oppresseur, ils recrutent des partisans. Ce livre fut jugé séditieux. Le pouvoir central y voyait un appel au soulèvement populaire.

Jean-David Morvan, directeur de la collection Ex-Libris, veut faire découvrir les grands textes fondateurs qui ont marqué les civilisations en les transformant en bandes dessinées. Pour cet album, l’illustre dessinateur Wang Peng a produit un sublime travail.

Au bord de l’eau de Morvan et Wang Peng aux éditions Delcourt 48 pages, 13,95 euros.

Zone de tir libre

Né Charles James Box, l’auteur pratique le mode de vie des personnages qu’il décrit, il est un intervenant du tourisme dans les Rocheuses. «L’homme en noir», comme est surnommé cet écrivain frimeur, a reçu tous les prix anglo-saxons du roman policier.

Voici la septième aventure du policier Joe Pickett dont la carrière a subi quelques aléas. Il est devenu un garde-chasse spécial au service du gouverneur du Wyoming. Le moment venu, il se plonge dans un bourbier juridique et politique. L’affaire se présente mal pour la loi et la justice. Dans le cadre idyllique d’une nature splendide, un sociopathe aligne les victimes. On peut supposer qu’un type qui ne se prend pas pour n’importe qui, fait n’importe quoi dans un secteur géographique où la justice n’existe pas. L’impunité est garantie dans cette enclave du Wyoming, où un vide pénal fait exister une zone de non-droit. De fait, un avocat connu commet le crime parfait en tuant quatre personnes dans la zone spécifique du parc de Yellowstone, se réjouissant de l'ambiance guerre des polices régnant au sein des forces l’ordre. Un vrai casse-tête à résoudre pour le nouveau garde champêtre.

Il convient de signaler aux amateurs de camping sauvage et de sensations fortes qu’après la publication et le succès de ce livre, la loi a été modifiée. Dorénavant, plus personne ne peut assassiner les gens dans ce parc naturel sans enfreindre la loi.

Zone de tir libre de C. J. Box éditions Points policier 477 pages, 7,90 euros.

Batchalo

Chez les Tziganes «batchalo drom» signifie bonne chance sur la route. Pour les gens du voyage la route n’est pas qu’un chemin, c’est leur vie. Avec la chance, tout avance mieux. L’action de ce roman graphique débute dans un village tchécoslovaque en février 1939, où deux enfants disparaissent. La cohabitation des villageois avec les romanichels du campement d’à côté pose déjà un problème, donc les coupables sont forcément les nouveaux arrivants, c’est l’émoi avant l’émeute. Pris à partie, les gens du voyage signalent la disparition de dix des leurs. Le père d’un des deux gamins manquants, Josef, est policier, il décide de leur faire confiance. En compagnie des romani, le gadjo va enquêter afin de retrouver la pistes des disparus. Cherchant inlassablement, ils finissent par comprendre l’horreur. L’armée des envahisseurs, pourvoyeuse de l’idéologie hitlérienne, a enlevé les enfants et les a déportés en Allemagne.

Intrépides, les parents franchissent la frontière, mais se retrouvent vite internés dans l’aberration du «Zigeunerlager», le camp tzigane de Birkenau. «Zigeuner» concerne les Tziganes. Himmler a promulgué leur extermination en décembre 1942.

Cette bande dessinée évoque le thème peu traité du «Porajmos». En langue romi, l’extermination des peuples gitans par les nazis. Bien documentés, les auteurs ont joint un dossier historique de huit pages en fin d’album.

Batchalo par Le Galli et Bétend aux éditions Delcourt 80 pages, 17,95 euros.

vendredi 27 juillet 2012

Le Tueur: Premier cycle

letueurEn format unique pratique, avec un beau visuel de couverture, des trois premier tomes de la série du tueur: Long feu, L'engrenage et La dette. Le tueur, ce personnage solitaire froid, méthodique qui aime faire consciencieusement son travail. Le lecteur ne connaît pas son nom. D'ailleurs, personne ne connaît le nom de cet individu, qui change de commanditaire à chaque mission, sans jamais déroger à ses principes rigoureux d'exécution. Pour ambiance oppressante avec des dialogues de qualité, le tueur s'impose.

Le Tueur: Premier cyclede Matz et Luc Jacamon, Ligne rouge, 184 pages, 15,20 euros

Fille du samouraï



samouraiExilée,  lorsqu’elle écrit les mystères d’un Paris métissé de black-blanc-beur, Dominique Sylvain  se plonge dans ses souvenirs. Elle aime le mélange des genres, ses romans oscillent entre la comédie macabre et le comique de situation qui se crée tous les jours dans la rue. L’étrange drame qui dérange plonge ses racines dans ce banal quotidien.

Son précédent roman, Passage du désir, voyait les débuts de deux femmes aux cœurs brisés, Ingrid Diesel et Lola Jost. Ce livre a reçu le prix des lectrices de Elle. Les aventures du duo de choc reprennent. Ingrid Diesel, la jeune Américaine généreuse, toute en muscles, épaule de nouveau Lola Jost, la Française, d’un certain âge, aux allures de bobonne inoffensive.

Par le canal de la télévision, un père apprend la mort de sa fille. Après être passée, par la fenêtre ouverte, cette jeune personne, sosie d’une chanteuse pour adolescentes prépubères, a embrassé le sol en tombant du 34e étage de l’hôtel Astor Maillol où elle séjournait. L’abus de champagne et une mauvaise hygiène de vie supposée précipitent les conclusions policières. L’enquête favorise la thèse du suicide. Pour Maurice Bonin, le père de la jeune fille, rien n’est moins sûr et il veut en convaincre ses deux amies, Ingrid Diesel, la masseuse de jour qui s’effeuille la nuit, et Lola Jost, l’ancien commissaire de police accrochée à ses puzzles. L’une s’active, l’autre réfléchit.

Fille du samouraï de Dominique Sylvain, Aux éditions Viviane Hamy, 284 pages, 9,99 euros.






Mystère rue des Saints-Pères

iznerLe pseudonyme ne l’indique pas, mais cet écrivain sont deux sœurs en une seule plume. Liliane Korb, ancienne chef monteuse de cinéma, devenue bouquiniste, et Laurence Lefèvre, licenciée en archéologie, aujourd‘hui libraire et écrivain. Elles écrivent ensemble depuis longtemps, tant pour la jeunesse que pour les adultes. De leur goût commun pour l’histoire et le polar est née l’idée de créer un nouveau personnage. Libraire, Victor Legris mène une vie rendue moins quotidienne grâce aux enquêtes qu’il s’attribue dans le Paris de la fin du XIXe siècle.

Attraction de l’Exposition universelle en juin 1889, la tour Eiffel est connaîtra 3.512.000 ascensionnistes en six mois. La foule afflue dans les pavillons célébrant les colonies. Les mondes encore libres sont l’objet d’une course de vitesse entre les peuples de l’Europe, d’après le préfet Eugène René Poubelle. Du haut de la tour, Le Figaro édite une «spéciale» chaque jour. Au bar américain du premier étage, Victor Legris a rendez-vous avec un ami journaliste, Marius Bonnet. Ce dernier lui fait une proposition. Bonnet vient de lancer un nouveau titre Le passe-partout un quotidien plein d’avenir dont il est le directeur et rédacteur en chef. Il recherche des collaborateurs afin d’élargir sa palette. Malheureusement leur entretien va tourner court. Une femme s’écroule, victime d’une piqûre sur la plate-forme. L’actualité n’attend pas. Cette mort brutale est la première d’une série de meurtres inexpliqués, voici donc les débuts d’enquêteur de Victor Legris dans les nouveaux mystères de Paris.

Mystère rue des Saints-Pères de Claude Izner aux éditions 10/18, 282 pages, 7,13 euros.

De cape et de crocs: de la lune à la terre

19_cape-et-de-crocsDon Lope le loup, le renard Armand et Eusèbe le lapin tirent leur révérence sur dix-sept ans de fringants délires et de citations d’Edmond Rostand. À la manière d’une comédie, chaque protagoniste est un archétype théâtral. Tenant à respecter l’esprit, plutôt que de restituer avec fidélité le XVIIe siècle, les auteurs s’inclinent devant le sieur Cyrano de Bergerac. Son Histoire comique des États et Empires de la lune, dans laquelle il exprime sa philosophie matérialiste, donne une trame à cet album. Un clin d’œil rendu par les auteurs au philosophe poète et spadassin, qui mourut d’une mauvaise tuile.

La qualité du langage employé touchera même un lecteur non amateur de bande dessinée.

Pour nos vaillants héros le temps est venu de rentrer, mais le traître n’a pas dit son dernier mot. L’honneur va s’opposer à l’amitié. Le nom du maître d’armes ne sera pas révélé. Quelle gageure que de surprendre son public dans le final!

De cape et de crocs: de la lune à la terre d’Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou aux éditions Album Delcourt 49 pages, 13,26 euros.

En charmante compagnie

charmanteEnseignant, membre du comité de bioéthique à l’UNESCO, Alexander Mc Call Smith vit à Edimbourg. Né au Zimbabwe, il a contribué à l’organisation de la première école de droit du Botswana. Dans la beauté des paysages et des couleurs de l’Afrique, des gens veulent simplement vivre au quotidien. En s’aidant d’un manuel, Precious Ramotswe a fondé l’Agence Numéro Un des Dames Détectives du Botswana. Cette femme encore jeune, dotée d’une constitution traditionnelle, a lutté pour s’imposer dans son travail. Tout homme peut prétendre à être un puits de science, mais aucun d’entre eux ne peut percer à jour l’alchimie des sentiments humains.

Perspicace, un peu chaman sur les bords, Mma Ramotswe est aidée dans sa tâche par son associée Mma Makutsi . Les déboires sentimentaux de sa collègue alimentent les potins locaux. Heureusement, la légendaire politesse botswanaise interdit d’en parler devant la personne. Pour le reste, Precious Ramotswe fait tourner son affaire, elle songerait même à embaucher.

Dans un pays brûlé par le soleil, dont les odeurs et les bruits affleurent à chaque page, les affaires des hommes sont bien ordinaires. Au détriment de la vieille morale botswanaise que Charlie, l’apprenti mécanicien, vient de tout plaquer pour suivre une riche rombière. Ce scandale ne suffit pas à plomber l’ambiance. Depuis quelques jours, un fantôme a surgi du passé, il arpente les rues de Gaborone, voilà ce qui tourmente la dame détective.

En charmante compagnie d'Alexander McCall Smith, 10/18 grands détectives, 288 pages, 7,13 euros.

Nostradamus et le dragon de Raphaël

NostradaL’auteur écrit des romans historiques et policiers. Documentées, les intrigues cernent l’histoire de France en l’utilisant pour la narration romanesque. Dans ce cadre authentique, on croise du beau monde à chaque page.

En 1536, Charles Quint veut que Dieu règne sur son empire romain d’occident. Un pays figure au milieu de ce projet. L’armée impériale envahit la France.

Vidée de ses habitants la Provence est pillée. La ville d’Aix est dévastée. Organisés, les résistants harcèlent les impériaux,  arrive la peste. L’empereur doit abandonner ses conquêtes et le butin sera caché. Le temps passe, jusqu’en 1564. Par malheur, le roi de France est un enfant de treize ans; dont la mère, Catherine de Médicis, s’évertue à la régence. Il lui faut conserver la monarchie à ses enfants. En ces temps troublés, chaque chef de parti religieux veut imposer son rite, son dieu, au détriment du pays et de l'ensemble des habitants. Un manuscrit est retrouvé. Rédigé en quatrains, il indique la cachette d’un trésor enfoui à Aix.

La fin des conflits armés entre les partisans de la réforme et les tenants de l’Église catholique sauvera le pays. La reine mère a besoin d’argent pour acheter la paix. Pour s’octroyer cette fortune, Catherine de Médicis réclame de l’aide à un ancien courtisan, Michel de Nostredame, un médecin astrologue qui vit retiré à salon-de-Provence. Aidé de son filleul Yohan, Nostradamus sera-t-il assez bon devin pour retrouver le trésor?

Nostradamus et le dragon de Raphaël de Jean d’Aillon, labyrinthes éditions Le masque. 457 pages, 8,26 euros.

jeudi 26 juillet 2012

À la trace

traceActuellement, Deon Meyer est l’auteur sud-africain le plus traduit. L’écrivain change ici son type de structure narrative. Dans cet opus, trois personnages ont trouvé leur auteur.

Août 2009, les services secrets débordent d’activité dans la capitale de l’Afrique du Sud. En dépit de cette agitation, le premier des personnages est une femme qui refait sa vie. Dans une société traditionaliste où l’émancipation féminine doit prendre forme. Ailleurs réapparaît un ancien garde du corps qui accepte la mission de protéger le convoi d’une espèce en voie d’extinction. Les activités pittoresques de la contrebande internationale ne lui causeront que des soucis. Le troisième volet incorpore au récit le personnage d’un détective devenu privé. Chargé d’enquêter sur une disparition, il découvre la culture gangsta rap des villes, tout en démêlant l’écheveau d'une pluralité d’activités criminelles.

La singularité d’une nation arc-en-ciel se reflète à merveille dans ce livre fleuve.

À la trace de Deon Meyer aux éditions du Seuil 724 pages, 22,04 euros.

Dans mon open space, tome 4: Variable d'ajustement

openspaceJames a abandonné une carrière de cadre afin de se consacrer à la bande dessinée. Il a débuté à l’Association (utopie éditoriale et esthétique créée en 1990). Ce quatrième album regroupe une série en six cases parue dans Challenges magazine.

L’auteur y revisite sa période d’emploi dans une entreprise. Le quotidien des salariés, les faits marquants de l’actualité sont commentés par les cadres d’une société spécialisée dans les dessous féminins. Une seule femme est cadre de direction, potentiellement, l’employé devient un sans-bureau-fixe. Esope précéda La Fontaine dans la fable animalière, exercice repris ici. Quel type de pachyderme véloce est très myope? Le patron rhinocéros, qui braille en portant des lunettes. Le directeur commercial, misogyne, fanatique de sport, lecteur assidu de presse spécialisée, est un bovin. Les audits sont deux charognards chargés des économies en personnel. Le traitement animalier des personnages permet de sourire des usages sans alourdir le propos.

Dans mon open space, tome 4: Variable d'ajustement de James aux éditions Poisson Pilote Album, 48 pages, 11,40 euros

La Nuit du Crystal

crystal
En 1960, le sociologue Edgar Morin et le cinéaste Jean Rouch ont enquêté sur la vie quotidienne de jeunes Parisiens afin de d’appréhender leur conception du bonheur. Journaliste, homme de radio et de télévision, on peut se demander si Jérôme Bellay, né en 1942, n’apporte pas sa réponse à cette «chronique d’ un été 1960». Natif de Chalon-sur-Saône, Jérôme Bellay a choisi la ville de Reims pour évoquer la jeunesse d’une bande de rockers éclatés dans les bulles de champagne.

Il dédicace ce livre à sa compagne, l’ancienne reine du disco, Karen Cheryl. En avant la musique.

À cette époque, la guerre d’Algérie attend les garçons et les filles font attention à ne pas tomber enceintes. Les parents sont ailleurs, dans un autre monde social, occupés dans une autre réalité. Ces jeunes plus ou moins beurrés sur tranche passent l’été de leur baccalauréat. La drogue reste timide. Des petits gars bien de chez nous, aux postures de voyous, qui cassent tout, volent des trucs, boivent comme des trous. Des phallocrates des temps anciens qui s’ennuient, bourrés. La tournante contre une godiche étrangère à leur groupe, c’est uniquement pour se distraire. Quels ravages cause cette absence de repères chez les jeunes, en autarcie, depuis la fin de la guerre! Qu’ils n’ont pas connue les veinards!

Une de leurs journées finit mal. Après une intrusion par effraction, un meurtre est commis, le chef du groupe soupçonné. Vingt ans après, la vérité doit éclater. La Nuit de cristal est le nom que les nazis donnèrent au pogrom de la nuit du 9 au 10 novembre 1938. Ce jeu de mots en titre est gênant. Il faut reconnaître que la cuvée Cristal est ce qui se fait de mieux dans les bulles chez Roederer. D’après ce qu’on dit.

La Nuit du Crystal de Jérôme Bellay, Le Cherche-Midi éditeur, 300 pages, 16,39 euros.

Les fantômes de Belfast

BelfastL’accord pour la paix du 10 avril 1998 a mis fin à quatre-vingts ans de guerre en Irlande du Nord. Lors de ce conflit fratricide, pour que triomphe «la cause», des hommes et des femmes sont devenus incendiaires, maîtres chanteurs, assassins. Jugés, emprisonnés, ces coupables deviennent des prisonniers politiques, objets des manifestations de la foule qui réclame leur libération.

Le titre original «Les douze» donne le sujet de ce roman noir. Douze est le nombre d’assassinats commis par le tueur paramilitaire Gerry Fegan. Quand il est libéré, ces crimes de guerre deviennent des meurtres. En temps de paix, Gerry Fegan boit pour oublier les cris de vengeance qu’il entend dans sa tête. Ses voix le damnent. Chaque soir, il se donne en spectacle, dénonce en hurlant les calculs politiques responsables des meurtres. Ses douze victimes crient justice. Il part en guerre contre les politiciens, les forces de police, les badauds qui regardent sans rien dire. Tout le monde doit payer un tribut aux morts.

Dans le contexte de l’Irlande d’après la sale guerre, le lecteur arpente les rues de Belfast, où, pour l’auteur, les figures des voyous et des politiques ne sont pas dissociables. Originaire d’Irlande du Nord, l’écrivain Stuart Neville ne déborde pas d’optimisme. La paix ne signifie pas, pour lui, la fin de tous les conflits. Ce livre est le premier tome d’une série de trois que devrait publier l’éditeur.

Les fantômes de Belfast de Stuart Neville, aux éditions Rivages Thriller, 411 pages, 16,99 euros.

mercredi 25 juillet 2012

Le baron Noir


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En 1976, dans le mensuel L’Écho des savanes, le baron noir s’était envolé. Parfois il lui arrivera d’être dessiné par d’autres, comme Christian Godard, Mandryka, Martin Veyron. Le rapace a volé de case en case dans Le Matin de Paris de 1977 à 1981. Cette intégrale a été corrigée par ses auteurs. Le propos s’est porté davantage sur l’environnement, au détriment de la critique sociale.

Dans cet album anthropomorphique, les animaux s’interrogent à propos de tout pour ne jamais rien changer. Chasseur sans scrupule, l’aigle baron noir s’occupe à décimer les rangs du troupeau de moutons. Fatalistes, les ovins immobiles subissent en bêlant les attaques en piqué du prédateur. Ils ne bougeront pas, jusqu’à la prochaine. Lui, le cruel prédateur, s’interroge, en grand tourmenté, sur ses motivations. Pourquoi chasse-t-il? La faim n’existe plus, l’ennui peut-être?

Le troupeau à poil laineux côtoie des rhinocéros policiers, des tatous capitalistes. L’apparition du baron noir nourrit les analyses des personnages. Son absence préoccupe les tortues philosophes davantage que ses nuisances. Jo le Crocodile est un ambitieux rampant. Le danger pour le féodal prédateur viendra d’ailleurs. Un dragon libéral, un robot formaté originaire d’une contrée exotique, prendra sa place. À la fin des années Giscard, la montée du libéralisme sauvage s’amorce. À chacun sa place dans l’ordre économique et le troupeau sera bien gardé.n noir s’occupe à décimer les rangs du troupeau de moutons. Fatalistes, les ovins immobiles subissent en bêlant les attaques en piqué du prédateur. Ils ne bougeront pas, jusqu’à la prochaine. Lui, le cruel prédateur, s’interroge, en grand tourmenté, sur ses motivations. Pourquoi chasse-t-il? La faim n’existe plus, l’ennui peut-être?

Le baron Noir de Yves Got et René Pétillon aux éditions Drugstore, 248 pages, 28.50 euros

mardi 24 juillet 2012

Les Enfants du massacre

Giorgio Scerbanenco (1911-1969) est né à Kiev d'une mère italienne et d'un père ukrainien fusillé durant la révolution d'octobre 1917. Autodidacte, il a fait tous les métiers pour vivre : balayeur, manœuvre, tourneur. Dans le même temps il fréquente les bibliothèques publiques auxquelles il peut avoir accès. Au retour d'un séjour en sanatorium, il travaille comme scénariste et essaie de vendre des espaces publicitaires dans des publications fantômes. Il débute en littérature par un récit publié dans un magazine populaire.

Pendant trente ans il collabore à une maison d'édition milanaise pour laquelle il écrit un milliers de conte, récits, nouvelles auxquels s'ajouteront des romans, le tout à l'eau de rose. Anti-Mussolinien, il doit se réfugier en Suisse où il est interné jusqu'à la fin de la guerre. De retour à Milan il devient directeur d'un magazine féminin où il dirige la rubrique courrier du cœur. A partir des années cinquante ses récits, qui virent du rose au noir, paraissent dans des collections policières.

Il crée un héros, un médecin radié de l'ordre pour euthanasie, qui devient collaborateur des services de la Justice de Milan. C'est un humain qui nous ressemble, généreux, et à qui la bêtise et le crime font piquer de terrifiantes colères froides.

Les Enfants du Massacre est le chef-d'œuvre de cet auteur. Dans ce récit l'ancien médecin doit dépasser son dégoût pour ausculter ce massacre commis par des gamins marginaux de la banlieue de Milan. Amoureux de cette ville, Scerbanenco la chérissait, mais dévoilait ses horribles protubérances. L'opulence et la richesse dont bénéficie la capitale lombarde, centre géographique et, de ce fait, plaque tournante de tous les trafics, déforment cette ville...

C'est aujourd'hui le malaise des banlieues que Scerbanenco dénonçait il y a trente ans. Il démontrait que l'image familière de nos grands centres urbains se doublait au noir et pas toujours le soir.

Les Enfants du massacre de Giorgio Scerbanenco, éditions Rivages/Noir, 254 pages, 8,22 euros.

Le déjeuner du Coroner

cotterillEcrivain londonien né en 1952, Colin Cotterill a enseigné et voyagé dans l’ancien Empire britannique, notamment au sein d’ONG pour la réinsertion des enfants prostitués. Aujourd’hui il vit en Thaïlande. Ce premier épisode des aventures du coroner Siri a reçu le prix polar SNCF 2006.

Laos, 1976. Les communistes du Pathet s’emparent du pouvoir. La plupart des intellectuels et tous les fonctionnaires quittent le pays. Siri Paiboun, un médecin qui a fait ses études à Paris, reste chez lui. À 72 ans, le docteur-camarade Siri, qui n’a jamais pratiqué d’autopsie, est nommé coroner principal du Laos. Il devient de fait le seul coroner, mais il se verrait mieux comme un Maigret à la sauce saté. Ce vieux sage revenu de tout considère que le commissaire parisien est son mentor. Tous les regards vont se tourner vers lui lorsque la femme d’un ponte du Parti meurt en plein banquet et que les cadavres de trois soldats vietnamiens sont retrouvés flottant sur les eaux d’un lac. Déterminé à résoudre ces crimes en dépit des tentatives d’intimidation, Siri mène l’enquête, recrutant au passage quelques vieux amis, mais aussi les chamans hmong, les esprits des forêts, et même ceux des morts qui le visitent en songe.

Le déjeuner du Coroner de Colin Cotterill aux éditions Livre de poche, 320 pages, 6,27 euros.

Dans la vallée de l’ombre de la mort

ombre_mortÀ l’automne 1864 en Virginie, les soldats de l’Union contre ceux de la Confédération font la guerre de Sécession. Dans les deux camps, la balle Minié (nom du militaire français qui l’inventa) fait des ravages. Cette balle conique pénètre et broie tout autour de l’os, conséquence: le membre atteint doit être amputé. Une scie, des chiffons, de l’eau, du fil, une aiguille, un tonneau pour jeter ce qui tombe, voilà tous les outils dont disposaient les médecins.

Un chirurgien qui ne peut plus opérer a été nommé respon-sable des services de santé de l’armée nordiste. Ce colonel manchot, Simon Wolfe, organise la prise en charge sani-taire après les combats. D’une description soignée, la recréation de l’ambiance de ce conflit flanque le cafard. Durant une inspection, cet homme de l’art découvre qu’un tueur s’attaque aux «Dunkers». D’origine allemande, ces protestants baptistes sont des pacifistes qui refusent de porter les armes. La justice étant à la guerre ce que la musique est à un militaire, une fois posé le problème s’avère compliqué. Les généraux ont une tendance naturelle à ignorer les civils. Mais un jour la paix sera de retour et les politiques s’inquiètent de leurs futurs électeurs rescapés. Heureusement, l’honnête colonel pourra faire quelque chose.

Ancien agent fédéral détaché auprès des réserves indiennes, connaissant la culture amérindienne, Kirk Mitchell est davantage connu pour sa série d’enquêtes menées au sein de cette communauté par les agents Emmett Parker et Anna Turnipseed.

Dans la vallée de l’ombre de la mort de Kirk Mitchell aux éditions Folio Policier, 525 pages, 7,69 euros.

100 bullets: première salve

100Ayant acquis le catalogue, Urban Comics réédite la saga des «Cent balles». Une seconde chance de se cultiver s’offre aux amateurs. Cet ouvrage est un plaisir à lui tout seul, donc personne n’est obligé de s’abonner aux cent épisodes de la série, débutée en 1999. Chaque opus fut conçu pour être lu sans prendre en compte le destin des autres protagonistes. Au début, tout commence à l’arrivée de l’agent Graves. Cet inconnu vous propose un accord. Il vous donne un attaché-case contenant le dossier complet des responsables de votre insondable malheur et un pistolet avec cent munitions intraçables. Se faire justice soi-même sans risque devient une possibilité. À prendre ou à laisser.

La première à affronter ce choix cornélien est une femme. Une jeune Latino sortie de prison nommée Dizzy, brûlée dans sa tête jusqu'aux pieds, elle n’a plus rien. Son mari et son enfant ont été abattus par une police pourrie et non par les membres d’un gang comme elle le pensait. Une erreur due à une énorme bévue. En parallèle, le mystérieux agent Graves propose son marché à un pauvre type nommé Lee Dollan. Des accusations de pédophilie l’ont laissé sans un sou. Deux destins marqués par le sceau de la fatalité. Et l’agent Graves deviendra le fil conducteur d’une conspiration exploitée avec bonheur par ses auteurs. Dizzy reviendra dire bonjour...

100 bullets: première salve de Eduardo Risso et Brian Azzarello aux éditions Urban Comics album, 176 pages, 16,63 euros

Le musée du docteur Moses

Le musée du docteur MosesOates a débuté son œuvre à quatorze ans, depuis elle n’arrête pas. En 1968 elle a 30 ans et l’Institut des Arts et des Lettres la distingue pour un roman d’étude sociologique Le Jardin des merveilles. Son roman Blonde racontait Marilyn Monroe, l’icône américaine mise en perspective pour les attentes du public par le star système hollywoodien. Deux fois en lice pour le Nobel de littérature, elle a déjà écrit des «thrillers» sous des pseudonymes. Comme une suite à ses écrits romanesques, son théâtre social, un recueil d’histoires bizarres paraît enfin sous son nom.
Le décor de ces récits est vite planté, l’action n’intervient que dans le quotidien banal de personnages divers, qui vont sortir de l’ordinaire par la porte de l’horreur.
La lecture de la première fable, qui raconte ce qui arrive quand on répond aux inconnus qui demandent: «Salut, comment ça va?» pendant le jogging quotidien, est à vous dégoûter de courir. La nouvelle donnant son titre au recueil raconte, quant à elle, la visite d’une petite boutique des horreurs, effectuée en compagnie du plus charmant des docteurs. La recherche du détail qui cloche, les propos sibyllins, l’atmosphère qui s’alourdit, voilà tout ce qui va inquiéter notre bon lecteur. Ce qui n’est pas sans rappeler le naturel et les bonnes manières du maître du suspense, Alfred Hitchcock. Ces textes exhalent aussi un relent du passé, comme un rappel tortueux de l’Edgar Allan Poe qui sommeille en Joyce Carol Oates.

Le musée du docteur Moses de Joyce Carol Oates aux éditions Philippe Rey, 256 pages, 20 euros

lundi 23 juillet 2012

Bonus


bonus
Une réédition de ce roman paru chez Grasset, dont l’auteur est un ancien de chaîne de télévision privée. Journaliste, scénariste, il était l’auteur des dialogues des personnages qu’interprétait Antoine de Caunes dans l’émission «Nulle part ailleurs». Devenu écrivain, il a créé une série ayant pour fil conducteur la Côte d’Azur.

Dans leur maison du Var, Romain et Charlotte sont en quête de la réussite. Monsieur est dans les travaux publics, madame est une esthète dont la vocation vient d’éclore. Elle vient d’être sélectionnée pour l’émission «Nouvelle star». Un soir, en absorbant le journal télévisé, ils sont saisis d’une illumination lucrative. Ils vont kidnapper le fraudeur qui passe au «20h», le même qui est soupçonné d’avoir volé une fortune. Dans leur projet de libre entreprise, ils comptent intégrer le demi-frère de Charlotte. D’après ce couple exemplaire, voler un voleur est une riche idée. Pourtant ils ont conscience de ne pas posséder toutes les compétences requises. Heureusement le beau-frère, lui, doit s’y connaître puisqu’il sort de prison. Ces génies associés vont s’attaquer à des millions qui font déjà courir les vilains. Le spoliateur, qui ne songeait qu’à son parachute doré, se débat déjà avec sa famille et son avocat. Il ne peut se fier à personne pour profiter de ses biens mal acquis. Sa célébrité a beaucoup nui à cet homme. Une critique d’un style de société qui se bâtit grâce au nouvel axiome: comment devenir millionnaire en regardant la télévision.

Bonus de Laurent Chalumeau aux éditions Rivages/Noir 437 pages, 9,17 euros

Rocketeer



RocketeerEmporté par une leucémie le 11 mars 2008, le dessinateur Dave Stevens avait débuté sa carrière en 1975 avec Russ Manning sur Tarzan. Par la suite, il collaborera avec Spielberg sur les visuels des Aventuriers de l’arche perdue, il travaillera aussi sur les clips de Michael Jackson pour Thriller. Il a vingt-sept ans quand il invente The Rocketter, un chef-d’œuvre esthétique en bande dessinée qui ranime le style des «pulps».

L’originalité de cette série en B.D. est de réinventer le style d’une modernité, telle qu’elle aurait pu être imaginée par les créateurs d’avant la Seconde Guerre mondiale. Tout en y ajoutant cette touche de modernité sexy grand public, les lecteurs n’ayant plus besoin d’être avertis depuis la libération sexuelle des années 1970.

Le personnage principal de ces récits d’aventures est Cliff Secord, un aviateur qui se produit dans des spectacles aériens et qui découvre un équipement de fusée dorsale. À partir de là, il devient la star spéciale de services pas ordinaires. Dans les dialogues on retrouve la verve narrative typique des récits d’action épiques des années trente et quarante. Les méchants sont de séduisants pervers avides de pouvoir et d’argent, le sportif candide devient un héros.

Rocketeer de Dave Stevens aux éditions Delcourt, 126 pages, 17,95 euros